Christophe Sabatier, vigneron-paysan dans l’Hérault : se diversifier et viser l’autonomie

Le 25/11/2020 à 11:52 par La rédaction

Vignes, céréales, fruitiers… Christophe Sabatier joue la carte de la diversification sur son domaine. Côté vignes, il sème notamment des céréales dans l’interrang qui seront moissonnées. À terme, son objectif est d’éliminer l’utilisation des énergies fossiles.

Blé semé un rang sur deux qui sera moissonné pour récupérer le grain.

Christophe Sabatier est paysan à Assas dans l’Hérault, au domaine de Cassagnole. Il cultive 16 hectares de grandes cultures (orge, féverole, pois chiche, colza, tournesol) valorisées en huiles ou pour l’aliment destiné à son élevage de porcs (objectif de vente d’un porc par semaine). Le domaine comporte aussi 12 hectares de vignes (carignan, grenache, syrah, merlot et cinsault pour les rouges ; muscat, viognier, marsanne, roussanne, vermentino pour les blancs) qu’il vinifie et commercialise en vins de France (sans sulfite ajouté), en vente directe. La ferme est créée par ses parents en 1988, en bio depuis 2000. “J’ai repris le domaine en 2005. Et en 2015, j’ai loué un hectare à un maraîcher, en traction animale, pour son installation. En 2017, j’ai rétrocédé 10 hectares de fermage à deux paysans boulangers. Ainsi, les produits vendus à la boutique du domaine vont se diversifier. L’installation d’une agricultrice en aquaponie est également prévue.” Christophe Sabatier envisage aussi la plantation de 450 fruitiers : cerises, abricots, prunes, pêches, nectarines, pommes, poires, noix et amandes.

Non travail du sol

Depuis trois à quatre ans, Christophe Sabatier sème dans les vignes, chaque année un interrang en engrais vert, et celui d’à côté en céréales. Et ce, en alternance un an sur deux. “Les engrais verts sont implantés la veille de la vendange, fin août.” En 2017, le couvert contient féverole, pois fourrager, phacélie, avoine noire, moutarde, radis. “Mais je vais faire évoluer le mélange, en rajoutant sarrasin, millet, sorgho, colza, mélilot…” Fin avril, Christophe Sabatier roule le couvert avec un rouleau faca, deux fois, à une semaine d’intervalle. Il profite de ces passages pour biner le rang. “Puis je ne touche plus au couvert et cela se dégrade jusqu’à l’automne. En octobre, je sème en direct le blé dedans.” Trouver la bonne période pour le roulage est primordial : ni trop tôt pour que les plantes n’aient pas envie de se relever, ni trop tard pour ne pas avoir de graines. La céréale du couvert, pas encore en paille au début du printemps, ne se relève pas sous le poids des autres plantes. “Pour moi l’idéal, c’est de rouler lorsque les plantes sont en train de fleurir.

Moissonner les céréales

Les céréales – des blés de variétés anciennes – ne font pas juste office de couverts végétaux. Elles sont récoltées et vendues aux paysans boulangers. “À l’avenir, je souhaite destiner le grain à un atelier de poules pondeuses que j’ai en projet.” Christophe Sabatier a acheté une moissonneuse de semencier d’occasion, de marque Wintersteiger, d’un mètre cinquante de barre de coupe, adaptée à ces interrangs larges de deux mètres cinquante. Seul gros frein à la réussite de la culture : les sangliers qui font chaque année de plus en plus de ravages. “Tout le domaine est clôturé, mais à certains endroits, je n’ai mis que des clôtures électriques, et ce n’est pas suffisant.

Un couvert sur le rang ?

Le domaine de Cassagnole sert de support au test d’une tuile en polypropylène : les tuiles Symbio sont disposées autour des ceps de vigne pour supprimer le désherbage sous le rang (voir encadré). Même s’il reconnaît leur efficacité, Christophe Sabatier n’est pas intéressé par ce type d’innovations. “Disposer du plastique au milieu de ma vigne me gêne. Même si les tuiles sont recyclées, que deviennent elles une fois qu’elles ne sont plus utilisées ?” Pour cette raison, il recherche plutôt des plantes rampantes et non grimpantes, poussant en hiver et arrêtant leur floraison en avril afin de ne pas concurrencer la vigne. Ainsi, il va tester la piloselle (lire Biofil 103) et un mélange d’espèces proposé par un semencier. “Je suis aussi en contact avec l’association “Les écologistes de l’Euzière”. Ils connaissent bien les plantes de la garrigue. Peut-être en connaissent-ils une qui puisse faire l’affaire. Même si cela reste compliqué ensuite de ressemer, ou replanter des espèces sauvages. Mais trouver une plante locale serait idéal.

En finir avec les énergies fossiles

D’ici 2020, Christophe Sabatier se fixe l’objectif de ne plus utiliser d’énergie fossile pour travailler ses vignes. “Je souhaite passer en traction animale. Je suis en train de construire les outils adaptés à cela, pour le binage, les semis, le roulage, la pulvérisation…” Pour la moisson des céréales, les chevaux, qui écraseraient les cultures en avançant, ne feront pas l’affaire. “Mais la moissonneuse a un moteur diesel, je pourrais donc la faire rouler à l’huile de colza.
Frédérique Rose