Pucerons sur salades : filets et biocontrôles en test

Le 11/07/2022 à 17:04 par La rédaction

Le projet Eclipse évalue l'efficacité contre les pucerons sur salades de produits de biocontrôle et filets, seuls ou combinés, et de la féverole comme plante relais. Les premiers résultats montrent un intérêt des filets dès plantation quand la pression est forte.

Les pucerons, notamment sur salades, sont une problématique récurrente pour les maraîchers, a fortiori en bio. Pour les gérer, le projet Eclipse ­ 2020-2022, financements FranceAgriMer ­ vise à identifier des méthodes basées sur la combinaison de leviers physiques et biologiques. Outre le pôle Légumes région Nord, pilote, sont aussi partenaires les stations expérimentales Caté (Finistère), Terre d'Essais (Côtes d'Armor), Sileban (Manche) et Sud Expé (pour le melon). Trois leviers ont été évalués : des produits de biocontrôle, des filets, seuls et en association, ainsi que des plantes relais. Les résultats sur salades ont été présentés le 15 mars au Sival, à Angers, lors d'une conférence organisée par l'Irfel (association française des stations d'expérimentation en fruits et légumes).

Biocontrôles peu concluants

Côté biocontrôle, quatre solutions sont testées : azadirachtine (2 à 3 L/ha ­ 2 à 3 applications maximum), macération d'ail (10 L/ha ­ 2 à 4 maximum), Beauvaria bassiana (1 L/ha ­ 5 maximum) et des sels potassiques d'acide gras (5 à 10 L/ ha ­ 2 à 3 maximum). « L'intervalle des applications était de sept jours, et les traitements ont été déclenchés quand on a trouvé des pucerons dans les parcelles », explique Aurélie Le GoffPrat, chargée d'expérimentation au Caté. Les résultats sont peu concluants, sans différence significative d'infestation entre le témoin et les modalités traitées, quel que soit le produit appliqué. « Le biocontrôle a peu d'intérêt seul », conclut Margaux Kerdraon, son homologue au pôle Légumes Nord. Pour les filets, quatre modèles sont étudiés : Diatex PEHD 30/24.22 (durée de vie : 4 à 7 ans), Diatex F520 (1 à 2 ans),

Filbio 838 de chez Texinov (2 ans), Filbio 317 (2 ans). Ils sont comparés à des filets de référence, différents pour chaque station. À savoir Mikroclimat au Caté et Terre d'essais, PDT F1070 au pôle Légumes région Nord et Cropsolution au Sileban. Les résultats des partenaires sont hétérogènes, avec des pressions de ravageurs différentes. À Terre d'essais, les filets sont posés une semaine après plantation, et 100 % des laitues ont eu au moins un puceron pour le Diatex PEHD 30/24.22 et les deux Filbio. Le témoin était à 95 %, et le Diatex F520 à 90 %. « On peut supposer que les pucerons étaient sous le filet au moment de la pose et qu'ils se sont développés, analyse Aurélie Le Goff-Prat. Ils peuvent aussi passer à travers le filet quand ils sont encore petits, aux premiers stades, puis après plusieurs mues, ils restent bloqués sous le filet. » En revanche, avec une pose dès plantation au Pôle Légumes région Nord, il y a significativement moins de pucerons sous filets qu'avec le témoin non bâché.

Filets contreproductifs en pression faible

En combinatoire, le Caté a testé la pose de filets puis le biocontrôle ­ macération d'ail et sels potassiques d'acide gras ­, et l'inverse. Les produits sont appliqués dès observation de pucerons, à raison de deux passages espacés de sept jours. Pour toutes les modalités, il s'est trouvé plus de pucerons dans le cas de l'association filet et biocontrôle que dans le témoin. « Les conditions de pression étaient faibles », justifie Aurélie Le Goff-Prat. Au Sileban, les résultats sont plus encourageants. Deux modalités se dégagent en situation de forte pression : filets PE30 et P520, puis application de sels potassiques d'acide gras. À l'inverse, en cas de faible pression, ces modalités semblent favoriser les populations de ravageurs, comme au Caté. « L'hypothèse est qu'en situation de pression faible, la régulation par les auxiliaires fait tout », analyse Margaux Kerdraon. Enfin, la féverole est testée comme plante relais, à 1 m, 5 m et 10 m, pour servir de support aux auxiliaires. « À 1 m, il semble que l'on ait un contrôle, mais on perd tout effet dès 5 m », synthétise Margaux Kerdraon, précisant que les résultats ont été différents d'une station à l'autre. D'autres plantes de service, relais et répulsives, vont être testées en 2022 pour la dernière année du projet. « D'après nos essais, les filets ont un intérêt quand ils sont mis dès la plantation et quand la pression puceron est forte », conclut Margaux Kerdraon. Quant aux produits de biocontrôle, « Seuls, ils n'ont pas d'intérêt, et celui-ci est mitigé avec le filet. Nous voulons préciser ce point en 2022 », ajoute Aurélie Le Goff-Prat. Leur adjuvantation va aussi être évaluée.

Marion Coisne


Stimuler les défenses des salades et associer les produits antipucerons

Gildas Bernardeau s'est installé au 1er janvier 2021, sur deux sites en Loire-Atlantique, à Thouaré-sur-Loire et au Cellier, débutant une conversion à la bio, sur au total 9,5 ha, dont 2,5 ha couverts. Il travaille avec son frère pour la vente en direct de ses légumes aux supermarchés locaux. 13 à 14 espèces sont cultivées, dont beaucoup de salades. « Je me diversifierai plus quand je serai certifié bio. Pour l'instant, j'ai récupéré dans le réseau de vente la place d'un producteur en conventionnel, je me suis calé sur ses assortiments. » Sur salades, « j'ai des soucis majeurs de pucerons depuis le début. J'ai dû en broyer, car elles ne sont pas venues, prises à coeur, avec des infestations dès le départ ». La problématique est surtout sous tunnel, moins en plein champ. « Une fois le site infesté, les pucerons vont dans le persil, les aubergines, etc. » Démuni, il essaie d'associer les moyens de lutte. « Petit plus par petit plus, on peut s'en sortir. » Cette année, en préventif, le producteur applique du Sof (classé engrais) de chez SPN Agrobio, pour renforcer la cuticule des salades, et un produit à base d'huiles essentielles en goutte-à-goutte pour stimuler les défenses. Contre les pucerons, il utilise de l'Essenciel (huile essentielle d'orange), suivi de deux applications de Flipper (acide gras) à 2-3 jours d'intervalle. « Pour favoriser les auxiliaires, on met aussi en place des bandes fleuries sur les bords des tunnels. » Pas de filets insectproof sur les tunnels, par crainte de l'humidité. Pour compléter ce programme, plutôt prometteur, il compte essayer la PBI l'an prochain. « J'ai vu au Sival que les oeufs de chrysopes pourraient être intéressants. »