Les structures sont contraintes de réduire leurs volumes. La production nationale de près de 270 000 porcs bio en 2022 devrait se situer autour de 200 000 en 2023.
Pascal Petit, responsable technique de Bio Direct, premier groupement – passé de 55 000 porcs il y a trois ans à 46 000 –, décrit la situation : « Nous étions à 1 000 porcs/semaine, désormais à près de 850, c’est difficile » . Face au contexte, des éleveurs cessent l’activité : départs anticipés, arrêts d’ateliers, parfois déconversions. Bio Direct compte une soixantaine d’éleveurs aujourd’hui. Outre les quotas de production, il faut déclasser. « Nous sommes obligés de le faire supporter aux éleveurs et nous ne sommes pas les seuls, n’ayant plus de trésorerie suffisante, mais nous les avons accompagnés sur une bonne partie de 2022 », précise Antoine Forêt, éleveur et président de Bio Direct. Présent à 50 % en magasins spécialisés, le groupement accuse des baisses de ventes de l’ordre de 15 %, idem en grande distribution. Les produits U Bio cependant, avec l’association des Porcs Bio de France concernant quatre groupements, dont Antoine Forêt est aussi président, gardent une certaine dynamique. « U fait partie de ceux qui ont le moins déréférencé. »
Les hausses de charges non compensées
Unebio est passé de 45 producteurs il y a un an à moins d’une trentaine, début avril. Pourtant une pause de développement dès 2019 pour prévenir un tassement des ventes devait maintenir 700 porcs/semaine jusqu’en 2025, rapporte Boris Jeanne, aujourd’hui ordonnanceur. « C’était sans compter une décroissance », souffle-t-il. Les volumes sont réduits de 30 % car les actes d’achat des clients baissent de 10 à 40 %, alors qu’Unebio est présent dans tous les réseaux de distribution. Et la grille de prix ne peut compenser les hausses de charges. « Il faudrait 60 centimes de plus au kilo de carcasse, poursuit l’expert. Les éleveurs supportent une grosse partie de la crise. Aucun ne gagne de l’argent. »
BVB est passé de 90 porcs/semaine à 70-75, déclassant depuis octobre et reportant des sorties d’animaux, mais « sans pénalités-poids pour ne pas impacter l’éleveur », signale Edouard Boudin, technicien spécialisé porc. BVB, qui ne vendait jusqu’alors que des carcasses entières, surtout en boucheries, se lance en restauration hors domicile. « C’est un levier pour écouler du porc bio et avoir plus d’équilibre matière, estime Franck Rougale, directeur de BVB. Des collectivités s’y intéressent. Nous avons tout intérêt à aller vers ces marchés et à être soutenus pour cela par les pouvoirs publics. » Ludivine Engoulvent, responsable de la filière porc Unebio confirme cet intérêt afin d’écouler les stocks si les objectifs étaient respectés.
Le quota de production
Le cheptel de truies est réduit afin de baisser le volume de porcs de 10 % par exploitation. Ce principe est retenu au moins chez Unebio, Bio Direct et BVB. De nouveaux quotas peuvent être actés. « Ils sont établis par les éleveurs , confirme pour BVB, Edouard Boudin. La baisse de 10 % par trimestre est basée sur leurs résultats des trois dernières années. Un éleveur qui fournirait plus sera pénalisé par porc supplémentaire sur le différentiel prix bio/conventionnel, car ces animaux devront être déclassés. » Ce différentiel est proche de 140-150 euros fin mars, le cours du conventionnel s’approchant de 2,40 €/kg de carcasse. Mais celui-ci était à peine à 2 €/kg il y a quelques mois, contre un prix bio entre 3,50 et 3,80 €/kg.
Frédéric Ripoche