Comment réduire les dégâts des brebis dans les vergers en végétation ? Selon les premiers résultats du projet Ecorce, piloté par le FiBL France, les fils électriques ressortent pour le moment comme le moyen le plus efficace à utiliser.
«En verger haute-tige, on peut faire pâturer les moutons à n'importe quel moment de l'année, mais pas en basse-tige, explique Martin Trouillard, chercheur au FiBL France. Nous voudrions permettre un pâturage tout au long de la saison, moyennant des adaptations mineures, au moment où les bénéfices sont maximisés. » Mais l'écorçage et abroutissement consommation de feuilles, bourgeons, jeunes pousses et rameaux sont les grandes craintes des arboriculteurs. Le projet Ecorce a comparé en 2021 des dispositifs visant à limiter ces comportements. Le premier essai a eu lieu en mai à la ferme du Valentin, à Bourg-lèsValence (Drôme). Des agnelles Shropshire ont pâturé une semaine un verger palissé, avec un chargement équivalent à 150 animaux/ha. Outre le témoin, deux modalités ont été testées : des fils électriques disposés en bas, et un affouragement dans l'idée de détourner les agnelles des arbres, avec mise à disposition de jouets en bois en forme de tronc.
Des excréments en répulsif
Les deux autres essais ont eu lieu en juillet à Loriol-surDrôme, chez des arboriculteurs, avec des brebis Préalpes. Le but de la première partie était d'étudier la limitation de l'écorçage avec des manchons sur les troncs et des badigeons : hélas, l'écorçage n'a pas eu lieu, impossible de conclure. La seconde partie visait l'abroutissement, avec deux mélanges pulvérisés sur le premier étage de branches charpentières, zone accessible aux brebis. Le premier mélange contenait une association de matière fécale du troupeau et de kaolin (Sokalciarbo), et le second du kaolin et du sable fin. Pour le moment, les premiers résultats montrent que seuls les fils électriques apportent une réelle efficacité. Le dispositif, à adapter, pourrait notamment être utilisé en conduite plate type murs fruitiers, dans vergers sous filet alt-insecte. Dans ce cas, la partie basse de ces filets est ouverte, avec un fil en bas pour éviter que les moutons mettent la tête dedans. Il pourrait l'être aussi en jeunes vergers pour sauver le bourgeon terminal. La pulvérisation d'excréments de moutons semble avoir eu un effet sur l'abroutissement. D'autres essais sont prévus en 2022, notamment sur le cuivre, les substances répulsives et le comportement alimentaire des brebis.
Des muselières pour moutons : peu convaincantes
Empêcher la brebis de s'attaquer aux branches, tout en la laissant brouter : c'est la promesse de la muselière Winebaa. En pratique, le système doit agir de façon que lorsque l'animal soulève la tête, la muselière reste en place, et quand il la descend pour brouter, elle s'entrouvre. Ainsi, il serait possible de laisser les animaux dans les vergers toute l'année. Arnaud Dufils, chercheur à Inrae, n'est pas convaincu par l'équipement : « il a été testé dans la Drôme mais n'a pas donné satisfaction. Les sangles venaient étouf- fer les brebis. Le système n'est pas au point », du moins pas pour les races utilisées dans les vergers de l'Hexagone. L'outil devait être testé dans le cadre du projet Ecorce, mais ne le sera pas. « Nous n'avons pas réussi à adapter les muselières Winebaa sur le museau des agnelles Shropshire », explique Martin Trouillard au FiBL. À la place, les agnelles bénéficient de foin à volonté et de jouets en forme d'arbre pour les détourner de la consommation des pommiers. Sans succès par ailleurs.