À l’appel de la Fnab, les bio se sont mobilisés à Paris ce mercredi 7 février, dénonçant le recul des exigences environnementales dans le monde agricole. Ils étaient environ 300, venus de la France entière, place du Palais-Bourbon, portés par les slogans : La bio en danger ; sauver la bio- protéger l’eau ; faites la bio, pas la guerre ; les OGM, c’est non ; en colère mais visionnaire… « Les bio se sentent les grands laissés pour compte des annonces de Gabriel Attal » , dénonce la Fnab. Soutenus par des organisations environnementales, des syndicats, des associations de bien-être animal, agricultrices et agriculteurs bio sont venus à la rencontre des parlementaires – députés et sénateurs – pour leur exprimer leur incompréhension face aux reculs environnementaux. Une quarantaine ont rejoint le cortège. « Nous réclamons un réel soutien aux filières bio, fers de lance de la transition agricole française », répètent-ils. Une délégation a été reçue par le directeur de cabinet du ministère de l’Agriculture.
Défendre le revenu oui, et les normes environnementales aussi
Alors que les revendications du monde agricole concernant les revenus sont largement partagées par la filière bio, les demandes concernant les normes environnementales sont, elles, considérées comme un non-sens. « 16% de Français sont aujourd’hui en insécurité alimentaire alors qu’on produit sur le territoire plus que ce qui est nécessaire pour nourrir toute la population. On n’est plus en 1950, on voit bien que le problème, ce n’est pas de produire plus mais de produire durablement, sans détruire nos outils de production que sont les sols, l’eau, la biodiversité », explique Philippe Camburet, président de la Fnab.
Pas de transition sans vraies solutions
« La suppression des exigences environnementales est un véritable recul et met en danger la transition agroécologique de la France », martèle la Fnab, à contre-courant des discours ambiants du monde agricole. « Continuer à soutenir un modèle qui a montré ses limites est illusoire », soutient-elle, rappelant que la bio, c’est 14% des fermes et 215 000 emplois : « Il faut préserver ce mode de production, et nous donner les moyens de le faire », soutiennent les producteurs bio, en direction des députés. « Nous ne sommes plus une poignée de baba cool qu’on peut ignorer, déclare Philippe Camburet. La moitié des jeunes qui s’installent en agriculture aujourd’hui le font en bio. C’est ne rien comprendre aux transitions profondes qui traversent le monde agricole que de nous ignorer. »
Aider les 60 000 fermes à surmonter la crise
Les filières bio ont chiffré les pertes qu’elles subissent à 550 millions d’euros sur deux ans. En annonçant vendredi dernier une enveloppe de 50 millions d’euros pour la prise en charge des pertes bio 2023 qui elles, s’élèvent à 300 millions d’euros, le premier ministre reste bien en dessous des besoins réels des producteurs bio. (À noter qu’une première aide de 94 millions a été allouée pour la période 2022-mai 2023). « Aujourd’hui, la bio représente 16% des agriculteurs, ce n’est pas rien, rappelle Philippe Camburet, très déçu par cette annonce, qui montre à nouveau le désintérêt du ministre pour la situation des fermes bio » . L’appel à mettre fin aux mobilisations sur le terrain alors que les bio ont été méprisés dans ces annonces interroge les agriculteurs bio sur la place qu’occupe aujourd’hui leur mode de production soucieux de l’environnement dans les préoccupations syndicales. « Les parlementaires ont voté, tout groupe politique républicain confondu, en faveur d’un appui indispensable à la bio de 271 millions d’euros, rappelle Philippe Camburet. C’est le montant nécessaire pour soutenir la bio, pas un centime de moins. »
La pause d’Ecophyto fait mal à la bio
Autre désillusion des bio : la suspension d’Ecophyto (même si cette pause ne durerait que jusqu’au Salon de l’agriculture). Mais le signal est mauvais. « Ce plan, on l’attendait depuis longtemps notamment parce qu’il devait apporter des réponses à des producteurs dont les cultures sont contaminées par les herbicides de leurs voisins sans être indemnisés », explique Philippe Camburet. Pour la première fois dans l’histoire d’Ecophyto, le nouveau plan prévoyait une ligne dédiée au soutien au développement des filières bio. « Le plan Ecophyto est un plan d’incitation à la transition, pas un plan d’interdiction, le suspendre est un chiffon rouge. La transition agroécologique ne sera possible que si elle est encouragée. » Pour les bio, elle ne peut pas être supportée uniquement par le monde agricole. « Dans un moment où la bio connaît une crise de marché forte, être considéré dans Ecophyto était vraiment opportun. » Les bio réclament aussi à cor et à cri la revalorisation des aides PAC pour les agriculteurs bio via un écorégime à 145€/ha/an pour assurer la rémunération des services environnementaux qu’ils rendent. Autre revendication : un vrai plan d’action pour relancer la demande en produits de qualité avec un coup de pouce anti-inflation pour les consommateurs.