Interfel, ANPP, FNPF ont été déboutés en référé contre Biocoop pour sa campagne publicitaire « N’achetez pas… Achetons responsable ». La pub pour les pommes a été jugée non attaquable.
« Achetons responsable », la dernière campagne publicitaire du réseau Biocoop, déployée du 15 au 30 septembre 2014 en salles de cinéma et sur affichage, a suscité de vives réactions au sein de la profession agricole. Traitée volontairement sur un ton décalé en incitant à regarder derrière les apparences, « elle vise à valoriser le positionnement engagé et militant de Biocoop », « à faire appel à l’éco-responsabilité et la transparence », explique l’enseigne. Elle concerne les produits de consommation courante, comme le lait, la pomme, les œufs, le riz et montre les effets néfastes de la production chimique intensive pour la planète et la santé. Son but est « de donner l’information et de laisser au consommateur son libre-arbitre ».
Accusée de dénigrement
Qualifiant cette campagne « de très agressive et stigmatisante », la FNSEA a réagi aux slogans « N’achetez pas de pommes (traitées chimiquement) » et « N’achetez pas du lait (non bio) ». Le syndicat majoritaire s’est dit « convaincu que valoriser sans stigmatiser, c'est possible » et doute que le développement de la bio doive « se construire sur un dénigrement des autres modes de production ».
À un moment où le consommateur se méfie de la qualité des produits alimentaires, les porte-paroles de la FNSEA considèrent qu’« en tant qu'acteur de la chaîne alimentaire, notre responsabilité doit être de participer à restaurer la confiance du consommateur dans son alimentation, chacun à notre niveau. »
Une requête a été présentée auprès du tribunal de grande instance de Paris par l’association interprofessionnelle des fruits et légumes frais (Interfel), l’association nationale pommes poires (ANPP) et la fédération nationale des producteurs de fruits (FNPF). Le motif invoqué portait sur le fait que la campagne publicitaire de Biocoop était de nature à causer un dommage à toutes les filières et induire en erreur le consommateur.
Rejet de la requête
Par une ordonnance datée du 28 octobre 2014, le président du tribunal de grande instance de Paris a rejeté cette requête. Il a estimé que « les requérantes ne peuvent soutenir (…) que la vue de ces visuels détourne le consommateur de la consommation de pommes et être ainsi à l'origine d'une altération substantielle de son comportement économique ».
Pour le tribunal, « le consommateur n'ignore rien des risques liés à l'emploi de substances chimiques de synthèse dans l'agriculture dont l'exposition de ses dangers fait l'objet de fréquentes campagnes d'information dans les médias ; qu'il a ainsi nécessairement à l'esprit ces risques lorsqu'il est mis en présence des visuels dont il s'agit ».
La pomme est en effet l’un des fruits les plus traités car très délicat à produire, et peut subir, en méthodes conventionnelles, de nombreux traitements chimiques, pouvant aller jusqu’à une trentaine.
Transparence
Pour Biocoop, cette décision signifie que la campagne n’était pas susceptible de causer un dommage imminent aux 3 associations demanderesses, qu’elle n’était en rien trompeuse pour les consommateurs et n’altérait pas leur comportement économique et enfin, que les chiffres avancés étaient exacts puisqu’ils résultent d’une étude de l’Inra.
« Depuis plus de 25 ans, Biocoop s’attache à promouvoir une consommation responsable qui respecte l’environnement dans une démarche d’économie solidaire », rappelle l’enseigne dans un communiqué, se félicitant de l’issue de ce référé. Elle insiste sur son rôle de militant attaché à promouvoir le bio en France, à informer les consommateurs quant aux alternatives existantes en terme de consommation et à alerter le grand public et les institutions sur les risques d’une agriculture intensive : « Transparence, équité et coopération représentent les valeurs fondatrices de Biocoop, un modèle précurseur, de changement durable en matière de production et de consommation ». Aujourd’hui, Biocoop rappelle l’importance de conserver en France la liberté d’expression sur un sujet aussi important pour l’ensemble de la société que l’utilisation des pesticides en agriculture.
C.R-F