La Fête de la Gastronomie, en septembre 2014, a vu arriver sur les tables un yaourt auréolé d’une double casquette : bio et fabriqué en Ile-de-France. Une quinzaine d’établissements, scolaires pour l’essentiel, est à ce jour livrée en yaourts Fermes bio d’Ile-de-France. Nature, sucrés et aromatisés à la fraise, telle est la gamme qui, bientôt, va s’enrichir d’un spécimen à la vanille infusée. À l’origine de cette réussite, un éleveur bio esseulé et un groupement de producteurs motivés.
Pas de collecte de lait bio en Ile-de-France
En entamant la conversion de sa ferme laitière à la bio en 2009, Yves de Fromentel, à Pécy en Seine-et-Marne, savait qu’il se lançait dans l’inconnu. « Biolait, le seul collecteur bio, ne passerait pas dans la région uniquement pour moi. La seule issue était le circuit court ». En parallèle naissait, en avril 2011, l’association de producteurs Fermes bio d’Ile-de-France ; ses 27 adhérents livrent aujourd’hui près d’une quarantaine de restaurants collectifs en légumes bruts, légumes 4e gamme, fruits et yaourts.
Depuis septembre 2014, c’est Yves de Fromentel qui fournit le lait à ces nouveaux yaourts, soit un objectif de 60 000 litres à l’année livrés à La Ferme de Sigy, une laiterie artisanale mixte de Seine-et-Marne, ce qui représenterait 40 % de la production actuelle de l’éleveur.
Vers un atelier fromager
Une aubaine pour Yves de Fromentel qui livre encore une grande part de son lait à la Société Fromagère de la Brie ; or, cette dernière le lui achète 0,34 euro/l, le prix du conventionnel. Si le prix établi avec la Ferme de Sigy (0,45 euro/litre) rattrape ce manque à gagner, s’alignant sur le prix moyen du lait bio (0,42 euro chez Biolait), Yves de Fromentel l’estime en dessous de ses coûts de production − 0,48 euro/l. Devant ce hiatus, l’aventure de la transformation a fait signe à l’éleveur qui crée sa propre fromagerie à la ferme : la Fromantellerie devrait démarrer son activité au 1er trimestre 2015 avec fromage blanc, crème, tomme, beurre au détail et Brie de Coulommiers… et l’embauche d’un employé. L’objectif est une meilleure valorisation de son lait en attendant une hausse du prix via la Ferme de Sigy, « une fois les yaourts appréciés ». Un terrain sur lequel la prudence est de mise, prévient Marie-Clémentine Foussat, chargée de mission Filières au Gab Ile-de-France : « Fermes bio d’Ile-de-France réalise un grand travail d’accompagnement pour faire accepter des yaourts bio à un prix impactant le budget des collectivités tout en restant rémunérateur pour l’éleveur puisque le prix se situe au-dessus de celui du marché de lait bio ».
Réduire pour grandir…
Changeant d’optique, l’éleveur de Fromentel envisage de réduire sa surface de 240 à 170 hectares et donc de diminuer de moitié son cheptel actuel composé de 90 vaches Holstein. Son volume passerait alors de 800 000 litres à 100 000 litres de lait en 2015. Outre la recherche de Jersiaises et de Froments du Léon, « pour un lait de très haute qualité », l’éleveur imagine un petit atelier volailles (50 poules), quelques moutons et cochons…
Ce parcours correspond à l’objectif du Gab Ile-de-France partisan « d’une agriculture bio qui a du sens, c’est-à-dire locale, rémunératrice pour l’éleveur, servant un but pédagogique puisque introduite en restaurants scolaires, s’enthousiasme Marie-Clémentine Foussat. C’est une véritable filière équitable ! » Poursuivant sur sa lancée, le Gab a accompagné la création de la Scic Coop bio Ile-de-France dont le but est de rendre les produits bio finis plus accessibles. Pour ce faire, l’idée est d’impulser des conversions grâce à la mise en place d’ateliers de transformation. « En lait, nous prévoyons un atelier de plus grande envergure » qui suivrait forcément une collecte régionale de lait bio. Une grande ambition projetée sur la toile 2020.
Gaëlle Poyade
Fermes bio d’Ile-de-France : le yaourt indispensable
Cette association économique de producteurs bio rassemble une offre bio (légumes bruts, 4e gamme, légumes secs, fruits, yaourts) à destination de la restauration collective − une quarantaine d’établissements, principalement scolaires, mais aussi le ministère de l’Agriculture – ainsi que des magasins bio.
Sa création est intimement liée à la mise à disposition de produits laitiers. « Le yaourt est facile à introduire en restauration collective à la différence des légumes, achetés en petite quantité – surtout en collège, lycée…− et dont le coût de livraison peut freiner, explique Marie-Clémentine Foussat, du Gab Ile-de-France. Un franco de port avait été établi à partir de 800 yaourts, ouvrant la voie à des commandes de légumes, légumineuses… ». La ferme qui livrait initialement Fermes Bio d’Ile-de-France ayant cessé son apport, Yves de Fromentel a repris le marché.