La Communauté d’Agglomération Seine-Eure (Case), qui regroupe 29 communes autour de Louviers, voulait se prémunir contre tout risque de pollution de sa ressource en eau potable.
Elle a décidé de créer une zone de 100 ha dédiée à l’agriculture bio sur le périmètre de protection rapprochée de ses forages des Hauts Prés à Val de Reuil. Avec l’aide de l’Agence de l’eau Normandie-Seine, du Conseil général de l’Eure et de l’État, la Case est en train d’acquérir les terres, jusque-là propriété de l’Établissement public foncier de Haute-Normandie dans le cadre de la ville nouvelle de Val de Reuil. 80 % de l’investissement foncier est pris en charge par des subventions.
30 ha de maraîchage bio
Une zone de maraîchage bio de 30 ha va être créée sur le périmètre. Le Grab de Haute-Normandie (groupement des agriculteurs bio) est partenaire du projet. En 2009, il avait réalisé un état des lieux du maraîchage dans la région qui avait notamment mis en avant la difficulté d’accès au foncier pour les candidats à l’installation. Le projet des Hauts Prés tombait alors à point nommé. Un appel à candidatures de maraîchers bio a été lancé à l’automne avec l’idée d’en retenir au final environ six. Les entretiens se déroulent actuellement pour déterminer quels sont les agriculteurs qui vont s’installer. Les projets aujourd’hui à l’étude sont portés soit par des personnes en individuel, soit par des associations d’insertion. Les candidats doivent être diplômés en agriculture ou avoir bénéficié d’une formation en maraîchage, avec aussi un minimum d’expérience de terrain.
Nouvelles conditions de location
Les terres étaient jusque-là louées en baux précaires à des céréaliers. “Constituer une zone de maraîchage de bonne taille implique de réorganiser les parcelles. Le projet a été expliqué aux agriculteurs en place qui ont accepté ce redécoupage”, explique Nathalie Lacaze, responsable du projet des Hauts Prés au sein du pôle Eau Assainissement à la Communauté d’agglomération. Pour pouvoir rester sur la zone, les agriculteurs se sont vus proposer de nouvelles conditions de location : puisqu’il s’agissait de préserver la ressource en eau, la Case leur a proposé des baux ruraux environnementaux avec un cahier des charges incluant le passage à l’agriculture bio. Pas question pourtant de les mettre au pied du mur. Le passage à l’agriculture bio nécessitant notamment l’acquisition de nouveau matériel, un dispositif d’aides est en création avec probablement une mise en commun des machines. Sur les six agriculteurs implantés, quatre ont décidé de rester et vont signer les nouveaux contrats. Ils vont donc se convertir à la bio, l’un d’entre eux sur la totalité de son exploitation, les autres uniquement pour l’instant sur les parcelles du périmètre de protection.
De nombreux débouchés
L’installation des maraîchers doit se faire, au plus tard, d’ici la fin de l’année, avec comme objectif de récolter les premiers légumes au printemps 2012. Il ne devrait pas y avoir de soucis quant aux débouchés : le Min de Rouen est structurellement en manque de produits bio. Par ailleurs, la Case souhaite développer le bio dans les cantines de ses écoles – une étude préalable est en cours à ce sujet avec l’aide d’Interbio Normandie. Une demande importante émane aussi des Amap locales. La ville nouvelle de Val de Reuil accueille chaque jour quelque 10 000 personnes qui viennent y travailler : une livraison de paniers pourrait se mettre en place sur ce site. L’objectif du Grab est de diversifier les débouchés entre circuits courts et vente directe, et circuits plus longs. Cette zone maraîchère périurbaine d’un type un peu particulier dans sa dimension collective est regardée de près par les autres agglomérations de la région qui, quasiment toutes, réfléchissent à des projets du même type.
Juliette Lakits
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Mutualisation de moyens
Étienne Leroy, chargé de mission maraîchage biologique au Grab de Haute-Normandie explique l’enjeu de projet : “Sur la future zone maraîchère, nous voulons arriver à la constitution d’un ensemble qui ne soit pas le simple voisinage de producteurs, au risque d’alimenter une concurrence non constructive. L’idée est de créer une dimension collective avec, par exemple, une mutualisation des moyens de stockage et du matériel, une réflexion collective sur la commercialisation. Ce travail en commun et cette entraide devraient améliorer la qualité de vie des maraîchers et les aider à pérenniser leur projet”.