Démarrer son activité de maraîchage, d’aviculture, ou autre, même sans avoir trouvé le terrain adéquat : voilà ce que proposent, dans la Drôme, Les Compagnons de la Terre(1).
Créée en 2006, cette association , qui exploite depuis 2008 des terres sur la commune de Die, s’est récemment installée sur une ferme de 8,5 hectares à Eurre. Candidats et candidates y sont les bienvenus ! “Sur ces terres – toutes en bio –, travaillent actuellement une personne en maraîchage et deux en PPAM, raconte Thierry Mignot, administrateur de l’association. Une quatrième devrait démarrer sous peu avec un projet d’arboriculture et de poules pondeuses.” Toutes conduisent elles-mêmes leur activité, de la plantation à la commercialisation, et bénéficient d’un statut juridique en signant un Contrat d’appui au projet d’entreprise (Cape), qui leur permet de commercialiser leur récolte.
Ce passage en “espace-test” est limité à 3 ans : au-delà de cette période, les personnes doivent pouvoir voler de leurs propres ailes… si elles trouvent des terres, et si elles le décident. “Sur les terres de Die, un jeune qui voulait faire de la lombriculture a choisi d’arrêter : il s’est rendu compte qu’en termes économique et d’organisation du temps de travail, cela ne lui convenait pas.” Pour autant, Thierry Mignot ne considère pas que cette sortie de l’espace-test, sans installation derrière, est un échec : “Notre objectif premier est de permettre de tester un projet agricole en étant le plus proche possible de la réalité. Nous nous situons vraiment en amont de l’installation.”
Recherches de foncier
À Die, un autre jeune accueilli en espace-test a quant à lui décidé de franchir le pas : il s’est installé en maraîchage, plants et poules pondeuses sur le terrain même où il a testé son activité. L’association s’est retirée, le laissant signer un bail avec la Communautédes communes qui prêtait le foncier. “Finalement, c’est le plus logique : nous, association, devrions bouger et laisser les personnes s’installer sur le terrain qu’elles connaissent ! Ce serait l’idéal : une sorte de pépinière agricole itinérante…” D’autant plus que Les Compagnons de la Terre trouvent assez facilement des terres : “Nous ne sommes pas sur la même problématique de foncier que les gens qui veulent s’installer. Dans un premier temps, nous demandons simplement à pouvoir rester au moins trois ans”, détaille l’administrateur.
Quant aux recherches de terres des personnes en fin de Cape, l’association fait un pari : “Étant présents 2 à 3 ans sur le territoire, en lien avec les autres agriculteurs, visibles auprès des élus et des circuits de distribution, il est probable que les candidats à l’installation trouveront plus facilement du foncier”, explique Pierre Ulrich, l’animateur de l’association.
Les projets examinés
Pour l’heure, l’association recherche toujours de nouveaux porteurs de projets. “À la mi 2011, il y avait encore de la place pour 2 ou 3 personnes, sur les terres d’Eurre. Nous avons diffusé l’information largement, dans les organismes de formation, dans la presse. Environ 25 personnes ont appelé, 5 se sont déplacées et une va entrer dans l’espace-test. Nous nous sommes demandés pourquoi si peu de jeunes répondaient à l’appel. Peut-être parce que cela reste une installation réelle, un vrai engagement ; ou bien parce que le côté financier paralyse.” Pendant la durée du Cape, sous réserve que les revenus générés par l’activité agricole ne dépassent pas un certain seuil, les porteurs de projet peuvent bénéficier de leurs droits aux allocations chômage. Une fois que l’activité génère du revenu, les charges habituelles s’appliquent. Mais l’association réfléchit à d’autres dispositifs, plus incitatifs, qui pourraient être mis en œuvre.
Pour entrer dans la pépinière, une commission examine les projets des candidats, qui peuvent aussi concerner l’élevage (cochons de plein air, brebis laitières, etc.). “Nous demandons simplement que les personnes présentent un projet cohérent et qu’elles soient d’accord avec la dimension collective de l’association.” Une réunion est programmée tous les lundis soir pour décider du fonctionnement au quotidien. Toutes les semaines, chaque porteur de projet s’engage à travailler 2 heures pour le collectif, par exemple sur l’entretien des abords, la taille des haies, dans le magasin de vente à la ferme…
4 ou 5 pépinières telles que Les Compagnons dela Terresont aujourd’hui en activité en France – et une trentaine en projet. Un réseau national se met en place, et pourrait se structurer dans le courant de l’année 2012.
Myriam Goulette
Contact : lescompagnonsdelaterre@gmail.com
(1) L’association est soutenue parla Communauté des communes du val de Drôme, l’agence de l’eau,la Fondation de France, et la région Rhône-Alpes dans le cadre du projet Biovallée.